Entreprendre dans un grand groupe ? C'est risqué !

L'intrapreneuriat comporte des risques
Intrapreneuriat selon Sabrina Murphy
2/3 des salariés sont attirés par les entreprises proposant un programme d'intrapreneuriat, mais seulement 37% des entreprises en proposent ! Oups ! 



C'est en tout cas ce que nous rapporte une étude Deloitte de 2017.

Si on peut se demander à quoi sert de monter un programme d'intrapreneuriat, eh bien au minimum, ça renforce l'attractivité de l'entreprise.

Bien sûr, on peut être un intrapreneur dans une entreprise qui n'a pas de programme structuré. Dans ce cas, la démarche se rapproche plus du corporate hacking.

Alors, est-ce l'intrapreneuriat sauvera l'entreprise ? Evidemment, la question est très orientée. C'est d'ailleurs ce qu'a décodé Gilles Delaloy dans son dernier article au titre évocateur: On me la fait (encore) à l’envers ! On ne peut pas s'arrêter à une telle vision simpliste comme nous l'avions également écrit sur le site des Hacktivateurs: Le corporate hacking ne sauvera peut-être pas votre entreprise, mais il peut vous sauver !

Bref, il ne s'agit pas de sauver le monde, mais malgré tout, l'intrapreneuriat est une tendance importante qui mérite qu'on l'analyse un peu plus.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que We Design Tomorrow a organisé un petit déjeuner sur le sujet. J'ai pu notamment apprécier la qualité du retour d'expérience de Charlotte Combe, intrapreneuse du i-lab d'Air Liquide.

Dans mon précédent post: Créer un incubateur - quelques conseils pour démarrer, j'avais traité du why, des moyens, du lieu et du choix des projets.

Je vous propose donc de compléter ces éléments en abordant la culture, le soutien au business et le risque.

La culture: 
Est-ce que votre entreprise s'appuie en priorité sur la structure, les flux ou les valeurs ? Dans quelle mesure les dirigeants souhaitent modifier l'équilibre existant ? C'est évident que la création et la diffusion d'un programme d'intrapreneuriat va engager votre entreprise dans la direction de l'auto-organisation (organisation opale dans la typologie de Frédéric Laloux). Si c'est ce qui est souhaité et que vous voulez limiter les résistances, vous avez intérêt à ce que le programme diffuse largement.

On peut par exemple faire un large appel à projet dans l'entreprise. C'est par exemple l'approche suivi par LVMH avec l'initiative DARE.

Mais que se passe-t-il pour tous ceux qui ne sont pas sélectionnés ? Si on génère des mécontents, sachant qu'ils communiquent 5 fois plus que les satisfaits, ça risque de compliquer beaucoup le recrutement des prochaines promotions.

C'est pourquoi je recommande d'apporter un soin particulier aux bénéfices pour ceux qui ne sont pas sélectionnés. Ils doivent être convaincus qu'ils ont vécu une expérience positive même s'ils n'ont pas été pris.

Le soutien au business:
Un programme d'intrapreneuriat étant rarement gratuit, les dirigeants vont en attendre des retours concrets. Vous avez déjà dû traiter ce point lors du "why" mais si on veut que le programme soit durable, il vaut mieux qu'il soit aligné avec les objectifs stratégiques de l'entreprise, à commencer par la recherche de nouveaux business.

Et là, ça se complique beaucoup:
- La R&D classique s'occupe déjà d'innovation incrémentale (sustaining innovation)
- Quant à l'innovation de rupture, elle s'adresse à des non-clients dans une chaine de valeur différente. Donc elle n'a pas le soutien des business unit, on ne peut prédire si elle sera rentable et quand et puis elle peut être en décalage avec les coûts de structure et donc les objectifs de marge de l'organisation actuelle.

Il s'agit du dilemme de l'innovateur. Pour y répondre, on peut se référer aux travaux de Clayton Christensen et en particulier "The Innovator Solution". Clayton propose 4 modèles d'organisation en fonction de l'adéquation du projet aux process et aux valeurs de la structure.

[Intrapreneuriat] Alignement avec les objectifs business et la culture, l'apport de Clayton Christensen

Il faudra donc apporter un soin tout particulier à l'implication des business unit dans la démarche. Car la transition des projets de la structure dédiée aux business units est toujours très délicate. La démarche culturelle évoquée plus haut peut être un outil utile pour les engager dans le projet.

Le risque:
Il est logique et souhaitable que l'organisation qui incite les collaborateurs à se lancer dans l'intrapreneuriat réfléchisse à encadrer cette pratique. Mais attention à ne pas sur-contrôler car comme je l'ai écrit dans Vive l'innovation libérée !, cela peut vite devenir contre-productif.
Selon moi, il est nécessaire que les intrapreneurs comprennent qu'ils s'engagent dans une démarche risquée. On ne peut pas définir a priori les parts qu'ils auront dans l'éventuelle spin-off ou la position hiérarchique dans le projet.

Comme l'explique très bien Pascaline Bertaux, coach pour le parcours intrapreneurs Léonard (de Vinci), il faut peu à peu que les intrapreneurs se comportent comme des entrepreneurs et que les managers se comportent comme des VC. Et quand le VC voit que le projet pourrait aller encore plus vite, il n'hésite pas à changer...le CEO.

Une démarche d'intrapreneuriat bouscule nécessairement les structures, les flux et même les valeurs de l'entreprise, il est donc important d'en avoir conscience et d'accompagner le processus afin de gérer les oppositions qui ne manqueront pas de se manifester.

Si vous souhaitez plus d'information sur ces différents points, n'hésitez pas à me contacter sur Linked-In ou à laisser un commentaire sur le blog.

Pour aller plus loin:
Etude Deloitte - L'intrapreneuriat
Crédits image:
https://www.linkedin.com/pulse/lintrapreneuriat-quels-bénéfices-pour-lentreprise-sabrina-murphy/
https://www.researchgate.net/figure/Fitting-the-tool-to-the-task_fig11_50369494


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