Une learning expedition peut-elle transformer mon organisation ?

Enfin, on organise une learning expedition

Même si c'est séduisant, une learning expédition n'est pas la meilleure solution pour transformer l'organisation vers plus d'innovation
Ça y est, les planètes sont alignées. Après un lobbying acharné, j'ai réussi à convaincre le PDG de mobiliser le top management sur le sujet de l'innovation. Mon responsable hiérarchique, directeur de la stratégie et du développement m'a appuyé et m'a débloqué un petit budget pour pouvoir enfin réunir des membres clés de la DSI, de la direction de la Transformation Digitale et même plusieurs patrons de business unit qui viennent de partout dans le monde.

En tant que responsable innovation*, je vois bien que notre marché évolue très vite et que nous tardons à nous adapter. Les process qui ont fait notre efficacité nous empêchent de saisir des nouvelles opportunités (Agile comme une startup et efficace comme un grand groupe !) et démotivent les salariés (Innovation : les salariés ont la solution !).

J'adorerais lancer un programme d'intrapreneuriat à grande échelle, mais, tout le monde le dit, il faut commencer par convaincre la hiérarchie et sécuriser un ou plusieurs sponsors solides. Alors, pour engager la dynamique, j'ai donc choisi naturellement de sensibiliser les dirigeants au monde des startups au travers d'une learning expédition.

Cet évènement est très important pour moi car j'ai également besoin d'harmoniser et de coordonner l'innovation au sein de mon groupe largement décentralisé. Beaucoup de patrons de business units (et pas uniquement ceux qui sont éloignés géographiquement) sont en train de lancer leurs propres initiatives et les startups que je rencontre régulièrement se plaignent de la difficulté de travailler avec autant d'interlocuteurs.

Un concentré d'innovation en mode pitch

Une learning expedition, rappelons-le, c'est avant tout une immersion dans un univers différent (ici celui des startups) afin de provoquer une expérience mémorable qui permette de réfléchir à sa propre pratique. Il faut donc combiner découverte, rencontres, prise de recul, débats internes et bien sûr du fun. N'oublions pas qu'il s'agit des top leaders du groupe. J'ai donc confié l'organisation de la learning expedition à un prestataire spécialisé et nous avons convenu ensemble de nous concentrer sur la découverte de l'écosystème parisien qui est très riche.

Faire tout entrer dans l'agenda contraint que nous avons est un véritable challenge. Il faut pouvoir parler d'intelligence artificielle et de machine learning, de blockchain et d'AR/VR. Il faut aussi faire prendre conscience de l'évolution de notre secteur, sans oublier de laisser de la place à la sérendipité en invitant des startups très décalées. Heureusement, le prestataire est rompu à l'exercice et les startups excellent à pitcher, c'est-à-dire à présenter leur solution de manière inspirante en 5 minutes.

Peut-on échapper à l"innovation theater" ?

Bref, ça y est, c'est le jour J, et je dois dire que je suis un petit peu anxieux. Il y a eu des petits incidents logistiques inévitables, mais tous les dirigeants qui comptent sont là et ils ont l'air contents. L'endroit choisi par l'agence est magnifique et illustre bien comment l'environnement peut influer sur la capacité à penser différemment. La journée démarre donc bien et les présentations s'enchaînent. A déjeuner, les échanges sont riches, on voit que les participants discutent entre eux de ce qui les a particulièrement marqué.

C'est l'après-midi que je constate que les choses dérapent. Certains participants ont les bras croisés et ne sont plus aussi enthousiastes que le matin. Il y a aussi ceux ressentent la fatigue du voyage ou encore ceux qui, malheureusement, sont mobilisés sur des urgences business. Je me dis que j'aurais peut-être dû interdire les portables comme on le fait au collège de ma fille.

Je profite alors de l'échange interne prévu à l'agenda pour les interroger sur la valeur qu'on peut attendre des relations avec les startups et là, je suis stupéfait : 1/3 y voient une bonne manière d'améliorer notre image, 1/3 pensent pouvoir y piocher quelques bonnes idées et seulement 1/3 estiment intéressant de mobiliser des startups pour travailler à résoudre en commun les problèmes qui se posent au business. Je repense alors à l'article L'inexorable déclin de la relation startup / grand groupe que j'avais lu il y quelques temps et qui fustigeait l"innovation theater".

Au final, tout n'est pas négatif pour cette journée, loin de là. Mais pour réellement transformer ton organisation et la rendre plus innovante, tu vas devoir réfléchir à la manière dont fonctionne ton entreprise et ses dirigeants, ce que Chris Argyris appelle les valeurs et le cadre d'action (Culture de l'échec : peut-on apprendre de ses erreurs).

Et puis, je t'ai proposé des pistes de solutions à redécouvrir dans Relation startups / grands-groupes, où en est-on ? et dans le Guide de survie pour les innovateurs qui agissent dans les entreprises hiérarchiques.

Mais, pour gagner du temps, tu peux aussi me contacter: 
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* il s'agit naturellement d'un exemple fictif, mais pas forcément irréaliste

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